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Crise au PDG : quand l’ancien parti au pouvoir se déchire sur les ruines d’un héritage contesté

Par la rédaction de GabonActu24 – Libreville, 22 juillet 2025

Le Parti démocratique gabonais (PDG), longtemps machine politique toute-puissante, n’est aujourd’hui que l’ombre de lui-même. Le 21 juillet 2025, le siège historique du parti au quartier Louis à Libreville est devenu le théâtre d’un nouvel affrontement, révélateur d’une guerre de leadership aussi ubuesque que symptomatique de l’effondrement moral et idéologique d’un parti qui n’a pas su se réinventer après la chute d’Ali Bongo Ondimba.

La tentative d’occupation des lieux par l’aile dirigée par Ali Akbar Onanga Y’Obégué — fidèle parmi les fidèles de l’ancien président — s’est heurtée à un refus catégorique de l’autre camp, mené par Blaise Louembé et sa secrétaire générale désignée, Angélique Ngoma. L’intervention des forces de l’ordre, appelées pour interdire une simple réunion de contact, donne un spectacle affligeant d’un parti qui, jadis, prétendait incarner l’unité nationale et la stabilité institutionnelle.

Une guerre de clans qui piétine l’héritage d’Omar Bongo

Fondé en 1968 sous l’impulsion d’Omar Bongo Ondimba, le PDG se présentait comme l’ossature politique du pays. Mais depuis le coup d’État d’août 2023, le parti tangue, se scinde et se caricature. Le refus d’accès au siège par l’aile Onanga révèle une fracture bien plus profonde : le PDG ne parle plus d’une seule voix, il est devenu un champ de ruines où chaque faction revendique la légitimité morale et historique d’un appareil sans boussole.

« Aucun d’entre nous n’a été radié du PDG », affirme Arthur Benga Ndjemé, secrétaire général adjoint 1 de l’aile Onanga, nommé en mai dernier par l’ancien président Ali Bongo. Il conteste ouvertement toute tentative d’exclusion, insistant sur le caractère volontaire de l’adhésion à un parti. Un argument que balaie implicitement Angélique Ngoma, gardienne autoproclamée du siège du parti, en affirmant qu’« aucun militant ne peut être refusé d’accès dans sa maison ».

Mais justement, de quelle maison parle-t-on ? Le PDG est-il encore une maison commune ou une copropriété dévastée, où chaque locataire barricade sa chambre ?

La confusion entretenue sur la présidence du parti

Le trouble s’aggrave lorsqu’Ali Bongo, depuis son exil londonien, déclare demeurer président du PDG. Une assertion qui semble ignorer la réalité d’un congrès extraordinaire, convoqué en septembre 2024, qui avait entériné une nouvelle organisation du parti, excluant de facto son ancien dirigeant.

Ce paradoxe est révélateur d’un drame politique plus large : le refus de tourner la page. Les anciens barons du régime, à l’image d’Ali Bongo ou de ses affidés, refusent d’accepter que le PDG, tout-puissant sous le régime déchu, ne soit aujourd’hui qu’une formation fragmentée, minée par l’opportunisme, l’absence de vision et les ambitions personnelles. La réorganisation du parti par l’aile Louembé n’aura été qu’une tentative cosmétique de donner une image de continuité à une formation politique qui ne sait plus à quel passé se vouer.

Un parti sans ligne, sans vision, sans avenir ?

Pendant que les factions s’entre-déchirent à Libreville pour le contrôle d’un bâtiment, aucune ne semble capable d’offrir une ligne politique claire ou de proposer un projet alternatif au pays. Où est le débat idéologique ? Où est la réflexion sur les responsabilités du PDG dans la dérive autoritaire, les affaires de corruption ou l’effondrement des institutions ? Nulle part. Le parti préfère s’enfermer dans une guerre intestinale que seule l’obsession du pouvoir motive.

Et pendant ce temps, les Gabonais, eux, observent parfois amusés, souvent consternés les lambeaux d’un parti qui, à force de calculs cyniques, a perdu toute crédibilité. Cette querelle de possession du siège de Louis est, en réalité, la métaphore d’une formation politique qui se dispute un trône vide, sans peuple, sans projet, sans horizon.

Le PDG survivra-t-il à ses fantômes ?

Loin d’être une simple crise de leadership, ce conflit révèle l’incapacité chronique du PDG à se refonder. Son héritage historique, loin de le protéger, l’enchaîne. Le culte du chef, la loyauté clanique, l’obsession de la légitimité historique : autant de poisons qui rendent toute mutation impossible.

Si les protagonistes de cette guerre interne continuent de faire primer leurs égos sur la reconstruction collective, le PDG risque fort de finir dans les marges de l’histoire politique du Gabon — un épitaphe pour un parti qui n’aura pas su mourir dignement, ni renaître utilement.

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