Crise politique : la démission express de Sébastien Lecornu, symbole d’un macronisme à bout de souffle

À peine nommé, déjà parti. L’épisode Lecornu aura duré moins de 24 heures, scellant une nouvelle humiliation politique pour un exécutif en fin de cycle. En présentant sa démission ce lundi matin depuis Matignon, Sébastien Lecornu a admis avec une lucidité désarmante : « On ne peut pas être Premier ministre lorsque les conditions ne sont pas remplies. » Une phrase qui résonne comme un aveu d’impuissance et, au-delà, comme la confirmation d’une crise profonde du système macroniste.
Un gouvernement fantôme avant même d’exister
Formé dans la précipitation, sans réelle cohésion ni assise parlementaire, le gouvernement Lecornu n’aura pas résisté à ses propres contradictions. Le projet de rassembler autour d’un “centre élargi” n’aura tenu que sur le papier. En réalité, c’est un exécutif orphelin de légitimité qui s’est effondré avant même d’avoir commencé à gouverner.
Cette implosion en quelques heures révèle la perte de contrôle d’Emmanuel Macron sur ses propres troupes. Depuis la chute du gouvernement Bayrou en septembre, le chef de l’État enchaîne les improvisations, donnant l’image d’un pouvoir à la dérive, en quête désespérée de partenaires politiques pour sauver ce qui reste de son quinquennat.
Le RN en embuscade, la gauche en ordre de bataille
Sans surprise, l’opposition n’a pas tardé à tirer à boulets rouges. Pour le Rassemblement national, la démission de Lecornu est la preuve ultime que “la majorité présidentielle n’existe plus”. Jordan Bardella appelle à une “dissolution immédiate de l’Assemblée nationale”, tandis que Marine Le Pen réclame un “retour aux urnes pour rendre la parole au peuple.”
À gauche, le ton est encore plus sévère. Mathilde Panot (LFI) parle de “chaos institutionnel”, tandis qu’Arthur Delaporte (PS) voit dans cet épisode la confirmation que “le macronisme a plongé le pays dans la confusion et l’instabilité.” Jean-Luc Mélenchon, fidèle à sa ligne offensive, relance la demande d’examen immédiat de la motion de destitution du président déposée en septembre.
Un système verrouillé, une majorité introuvable
Au-delà des joutes partisanes, cette démission express met en lumière un problème structurel : la Ve République, telle qu’elle est pratiquée par Emmanuel Macron, semble désormais à bout de souffle. Le président a épuisé sa réserve d’alliances, fracturé le centre, et désorienté la droite modérée comme la gauche réformiste.
Sébastien Lecornu, pourtant fidèle parmi les fidèles, aura servi de fusible à un système politique verrouillé, incapable de se réinventer. En réalité, ce n’est pas seulement un Premier ministre qui tombe, mais tout un mode de gouvernance fondé sur le calcul, la communication et le mépris du débat démocratique.
Une confession déguisée en démission
En déclarant qu’“on ne peut pas être Premier ministre lorsque les conditions ne sont pas remplies”, Lecornu a résumé, en une phrase, le naufrage politique d’un quinquennat. Les “conditions”, ce sont d’abord l’absence de majorité, mais aussi le déficit de confiance entre l’exécutif et les Français. En refusant de servir de caution à un pouvoir isolé, l’ancien ministre des Armées envoie un signal clair : même les fidèles ne veulent plus assumer la responsabilité d’un projet devenu illisible.
Une impasse politique majeure
Alors que l’Élysée tente de gagner du temps, le pays, lui, s’enlise. Le climat social est tendu, la défiance s’installe, et la machine institutionnelle tourne à vide. Agnès Pannier-Runacher, dans un rare moment de franchise, a d’ailleurs reconnu sur X : “Je désespère de ce cirque où chacun joue son rôle mais où personne ne prend ses responsabilités.”
L’échec Lecornu est donc plus qu’un accident : il est le symptôme d’une fin de règne. Emmanuel Macron, désormais seul face à une Assemblée hostile et une opinion épuisée, joue sa dernière carte. Mais une question s’impose : peut-on encore gouverner la France quand plus personne ne veut gouverner avec vous ?
