Gabon : la Contribution foncière unique, un impôt qui soulève des questions

À dix jours de l’échéance du 30 avril, l’administration fiscale gabonaise hausse le ton pour inciter les propriétaires fonciers à s’acquitter de la Contribution foncière unique (CFU). Instituée en 2023, cette taxe regroupe les contributions sur les propriétés bâties et non bâties. Si l’objectif affiché est de simplifier la fiscalité et d’élargir la base contributive, le contexte et les modalités de son application suscitent encore des interrogations.
Une réforme justifiée, mais peu vulgarisée
Selon les autorités, la CFU résulte d’un souci de simplification. « Il fallait fusionner deux impôts en un seul pour clarifier les choses », a déclaré Paul Abessolo Esso’o Minto’o, directeur de la Législation et du Contentieux à la direction générale des Impôts. L’idée semble pertinente sur le plan administratif. Mais dans la pratique, la plupart des propriétaires concernés affirment découvrir l’existence de cet impôt à l’approche de la date limite.
Ce décalage met en lumière un défaut de communication, voire une précipitation dans l’application d’une réforme qui méritait peut-être plus de pédagogie. Une question se pose alors : peut-on exiger le respect d’une mesure encore mal connue d’une large partie de la population ?
Un impôt pour une minorité ?
Autre point sensible : le nombre de contribuables réellement concernés. À ce jour, seuls 14 000 titres fonciers ont été délivrés à l’échelle nationale. L’assiette fiscale de la CFU apparaît donc relativement étroite. Cela laisse entendre que la grande majorité des occupants fonciers ne sont pas en situation régulière, ou du moins, non reconnus comme tels par l’administration.
Cette réalité soulève une problématique plus large : l’accès au titre foncier reste complexe, long et souvent coûteux. L’État peut-il raisonnablement espérer un élargissement des recettes sans résoudre ce verrou structurel ?
Sanctionner ou accompagner ?
Les autorités ont annoncé que des sanctions pourraient frapper les contrevenants après le 30 avril. Si l’objectif est de faire respecter l’impôt, certains observateurs suggèrent qu’une approche plus incitative aurait pu être envisagée. Par exemple, des facilités de paiement, des réductions pour paiement anticipé, ou encore un programme d’accompagnement à la régularisation foncière.
À défaut, la mesure risque d’accentuer le sentiment d’injustice chez certains petits propriétaires, qui se retrouvent soumis à une obligation qu’ils ne comprennent pas toujours et pour laquelle ils ne se sentent pas préparés.