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Guinée-Bissau : les militaires annoncent la prise du pouvoir et la suspension du processus électoral

Bissau, 26 novembre 2025 — La Guinée-Bissau a replongé mercredi dans l’incertitude politique après l’annonce, par une partie de l’armée, de la prise de contrôle totale du pays et de la suspension immédiate du processus électoral. L’intervention survient alors que la nation attendait encore les résultats de l’élection présidentielle et des législatives, tenues trois jours plus tôt.

Dans un message solennel diffusé depuis le siège de l’état-major, le général de brigade Denis N’Canha, entouré de soldats armés, a déclaré que « toutes les composantes des forces armées » formaient désormais un Haut commandement pour la restauration de l’ordre, chargé d’assurer la direction du pays « jusqu’à nouvel ordre ».

Selon lui, cette action militaire vise à « garantir la sécurité nationale », après que les services de renseignements auraient détecté un « plan de déstabilisation impliquant des réseaux locaux du narcotrafic » et l’introduction clandestine d’armes destinées à « changer l’ordre constitutionnel ». Le général a appelé la population au calme.


Tirs près du palais présidentiel et panique dans la capitale

Plus tôt dans la journée, de fortes détonations avaient été entendues autour du palais présidentiel. Des militaires avaient établi des barrages sur l’artère principale menant au bâtiment, provoquant des scènes de panique dans le centre de Bissau. Des centaines d’habitants ont fui la zone à pied ou en voiture, tandis qu’un calme relatif est progressivement revenu en fin d’après-midi.

Une source sécuritaire affirme que le président sortant Umaro Sissoco Embalo a été arrêté et se trouve « détenu à l’état-major ». Il serait « bien traité », selon un officier cité sous anonymat. Le chef d’état-major et le ministre de l’intérieur auraient également été interpellés.


Un pays habitué aux bouleversements politiques

Depuis son indépendance en 1973, la Guinée-Bissau, petite nation d’Afrique de l’Ouest, a connu quatre coups d’État réussis et de nombreuses tentatives. Les crises post-électorales y sont récurrentes, notamment lors de la présidentielle de 2019 où plusieurs mois de contestation avaient opposé les camps d’Embalo et de son rival Domingos Simões Pereira.

Le scrutin de dimanche avait déjà été marqué par de vives tensions : le PAIGC, principal parti d’opposition, avait été exclu de la course présidentielle et des législatives pour dépôt tardif de dossiers, une décision dénoncée par l’opposition comme une tentative de manipulation.

Dans la nuit de mardi à mercredi, les camps du président sortant Umaro Sissoco Embalo et celui de l’opposant Fernando Dias da Costa avaient chacun revendiqué la victoire, alors que les résultats provisoires n’étaient attendus que jeudi.


Frontières fermées et couvre-feu

Dans son allocution, le Haut commandement militaire a annoncé une série de mesures :

Fermeture des frontières terrestres, maritimes et aériennes,

Couvre-feu obligatoire, dont les modalités exactes n’ont pas encore été précisées,

Suspension immédiate de toutes les opérations électorales en cours.

Ces annonces accentuent les préoccupations de la communauté internationale, d’autant que le pays connaît déjà une grande fragilité institutionnelle et économique.


Une transition aux contours incertains

Pour l’heure, les militaires n’ont pas indiqué la durée de la transition ni les modalités d’un éventuel retour à l’ordre constitutionnel. Aucun signal n’a été donné concernant la formation d’un gouvernement provisoire ou l’organisation de nouvelles élections.

Les organisations régionales CEDEAO, Union africaine n’ont pas encore réagi officiellement, mais pourraient rapidement dénoncer ce renversement du pouvoir, fidèle à leur ligne de fermeté contre les coups d’État en Afrique de l’Ouest.

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