100 milliards de FCFA pour la SEEG, un chiffre ahurissant pour une société au quasi-monopole
L’annonce par le président de la transition, Brice Clotaire Oligui Nguema, d’une enveloppe de 100 milliards de FCFA pour la Société d’Énergie et d’Eau du Gabon (SEEG), a de quoi interpeller. Cette somme faramineuse destinée à résoudre les problèmes structurels d’une société au quasi-monopole sur la distribution d’eau et d’électricité soulève des questions cruciales sur la gestion et l’efficacité de cette entreprise.
Une nécessité ou un gaspillage ?
Au premier coup d’œil, 100 milliards de FCFA (environ 150 millions d’euros) paraissent disproportionnés pour une société qui, malgré son monopole, souffre de maux structurels et organisationnels. Depuis des années, la SEEG est au cœur des critiques : installations vétustes, pannes fréquentes, gestion calamiteuse, et, plus récemment, accusations de fraude interne.
Avec une telle enveloppe financière, on pourrait s’attendre à ce que la SEEG ait déjà les moyens de s’autofinancer. Pourtant, elle continue à trébucher, incapable de répondre aux attentes légitimes de la population gabonaise.
Certains se demandent si un tel montant ne devrait pas être consacré à la concurrence ou à des réformes plus audacieuses du secteur de l’énergie, ouvrant la voie à des acteurs privés capables d’insuffler une dynamique nouvelle.
Le monopole qu’exerce la SEEG semble lui offrir une immunité contre l’efficience et la remise en question. Les réformes annoncées par le Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) sont certes ambitieuses, mais la question centrale reste : pourquoi une société, censée être en position dominante, nécessite-t-elle un soutien aussi massif de l’État ?
La pertinence de l’investissement
Pourtant, en dépit de ce scepticisme, il faut aussi reconnaître les efforts engagés par le gouvernement de transition. Le plan « Tranfo 2025 », visant à stabiliser la fourniture d’électricité et d’eau d’ici à 2025, est ambitieux. Mais ce plan ne pourra réussir qu’à condition que la SEEG montre des signes clairs d’amélioration. Les investissements dans de nouveaux transformateurs, groupes électrogènes et la modernisation des infrastructures semblent aller dans la bonne direction. Encore faut-il que ces initiatives ne s’enlisent pas dans les mêmes travers bureaucratiques qui ont paralysé la SEEG durant des décennies.
Au-delà des montants astronomiques, il est aussi important de souligner que la population gabonaise attend des résultats concrets. Les citoyens sont fatigués des pannes à répétition et de l’inefficacité de la gestion du service public. Si la SEEG n’arrive pas à inverser cette tendance avec ces 100 milliards de FCFA, il sera légitime de s’interroger sur la pertinence de maintenir ce quasi-monopole.
Une responsabilité partagée
La balle est désormais dans le camp de la SEEG et des autorités gabonaises. L’importance de cet investissement témoigne de la confiance placée dans cette entreprise pour améliorer les conditions de vie des Gabonais. Mais cette confiance a des limites. Brice Oligui Nguema a lancé un appel au patriotisme et à la responsabilité des acteurs du secteur. Ce rappel est essentiel, car au-delà des moyens financiers, c’est la volonté de réforme, de transparence et d’efficacité qui permettra de sortir la SEEG de l’ornière.
En fin de compte, ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement la gestion de 100 milliards de FCFA, mais l’avenir d’un service public vital pour des millions de Gabonais. La transition énergétique et la modernisation du secteur de l’eau et de l’électricité au Gabon ne peuvent se permettre un nouvel échec. Le prix à payer serait bien plus élevé que cette enveloppe, aussi impressionnante soit-elle.