Brice Clotaire Oligui Nguema : Une parole rare réservée aux médias internationaux, les médias nationaux en attente
Depuis sa prise de pouvoir en septembre 2023, le président de la transition gabonaise, Brice Clotaire Oligui Nguema, s’est exprimé avec parcimonie dans les médias. Lorsqu’il rompt le silence, c’est au média panafricain Jeune Afrique, basé à Paris, qu’il réserve l’exclusivité de ses déclarations.Cette interview, largement diffusée et attendue, a permis au président de revenir sur le bilan de la transition, les réformes engagées, la gestion de la dette publique et les perspectives politiques à venir, notamment en vue de l’élection présidentielle prévue pour avril prochain.
Mais ce choix de s’adresser en priorité à un média étranger soulève des interrogations sur les modalités de communication présidentielle et la place accordée aux médias gabonais dans ce processus.
Une stratégie de communication tournée vers l’extérieur ?
Pour les observateurs, ce choix stratégique n’est pas anodin. S’adresser à un média international permet de contrôler l’image présidentielle, tout en touchant une audience plus large, notamment la diaspora gabonaise et les partenaires internationaux du pays.
Cependant, la presse nationale aurait pu jouer un rôle complémentaire, en offrant une perspective locale plus proche des réalités du terrain.« Cette démarche permet au président de cadrer sa communication dans un environnement plus maîtrisé, où les questions peuvent être davantage orientées sur les grandes orientations politiques et diplomatiques, plutôt que sur des problématiques locales immédiates », explique un analyste politique basé à Libreville.
Pour autant, nombreux sont les journalistes gabonais qui regrettent de ne pas avoir accès directement au président. « Nous avons une responsabilité envers nos lecteurs et auditeurs, celle de poser les questions qui concernent leur quotidien : les réformes sociales, l’avenir de l’éducation, ou encore les mesures économiques pour lutter contre la précarité », souligne un rédacteur en chef d’un média local.
Un manque de dialogue avec la presse nationale ?
Depuis le début de la transition, les médias locaux n’ont pas bénéficié d’opportunités similaires pour échanger directement avec le chef de l’État. Ce silence nourrit une certaine frustration au sein des rédactions, qui estiment être en première ligne pour relayer les préoccupations des Gabonais.
Cette absence de dialogue soulève également une question centrale : quelle place pour les médias gabonais dans la communication présidentielle ? Dans un pays en pleine recomposition politique, où les attentes de la population sont nombreuses, la presse locale reste un acteur clé pour garantir la transparence et l’accès à une information de proximité.
Les enjeux d’une communication inclusive
Dans une transition politique, la communication joue un rôle fondamental dans le renforcement de la confiance entre les citoyens et les institutions. Pour certains spécialistes, une ouverture accrue envers les médias nationaux pourrait contribuer à renforcer ce lien, tout en consolidant la démocratie et la participation citoyenne.
« Les médias locaux ne sont pas de simples relais. Ils participent à la construction d’un débat public. Ne pas les associer aux grandes décisions politiques, c’est risquer de laisser une partie du pays dans l’ombre », affirme un expert en communication politique.
Une ouverture attendue
Si l’interview accordée à Jeune Afrique a permis d’éclairer certaines des intentions du président de la transition, de nombreux journalistes gabonais espèrent désormais un changement d’approche, avec une communication plus ouverte et inclusive.
La prochaine élection présidentielle pourrait constituer un moment décisif pour renforcer ce dialogue entre les autorités et les médias locaux. Dans un contexte où l’information et la transparence sont plus que jamais essentielles, l’intégration de la presse nationale dans les échanges avec les institutions pourrait être un signal fort, à la fois pour la profession et pour le peuple gabonais.