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Ile Mbanié : un comité d’experts pour pacifier le contentieux

Par la Rédaction – 5 juin 2025

C’est une annonce à fort potentiel diplomatique, mais dont les implications réelles restent à observer avec lucidité. En visite officielle à Malabo, le président gabonais Brice Clotaire Oligui Nguema et son homologue équato-guinéen Teodoro Obiang Nguema ont convenu de la création d’un comité conjoint d’experts chargé de trouver une solution « pacifique et définitive » au différend frontalier opposant les deux pays autour de l’île Mbanié.

Présentée comme une avancée vers un règlement par le dialogue, cette décision survient dans un contexte où les tensions sur ce dossier ne sont pas nouvelles. En effet, l’île Mbanié, petite mais symboliquement stratégique, cristallise depuis plusieurs décennies les rivalités de souveraineté entre Libreville et Malabo. Plusieurs tentatives de médiation ont échoué ou été ajournées, laissant planer un doute quant à la sincérité des engagements successifs.

Un comité d’experts : innovation ou écran de fumée ?

Le comité annoncé, composé de techniciens et de juristes des deux pays, aura pour mandat de plancher sur une solution concertée, loin des prétoires internationaux. Une approche que les observateurs saluent pour sa volonté d’éviter la judiciarisation du conflit. Mais dans les cercles diplomatiques, certains s’interrogent : ne s’agit-il pas, une fois de plus, d’un mécanisme dilatoire pour gagner du temps sans trancher le fond du problème ?

« On a déjà vu par le passé des déclarations similaires restées sans suite. La nouveauté de ce comité dépendra de sa capacité réelle à produire des résultats concrets dans un délai défini », analyse un spécialiste des relations internationales en Afrique centrale.

Une paix diplomatique, mais une tension latente

Il est à noter que malgré les discours apaisants, la méfiance n’a jamais complètement disparu entre les deux capitales. L’enjeu est autant politique qu’économique : les eaux autour de Mbanié sont potentiellement riches en ressources halieutiques et pétrolières, rendant tout compromis d’autant plus sensible.

Dans cette optique, la volonté affichée de régler le différend par la négociation est certes louable, mais elle doit s’accompagner de transparence, de calendrier clair et de garanties mutuelles. Autrement, ce comité pourrait rejoindre la longue liste des mécanismes de coopération continentale sans effet réel.

Une visite hautement symbolique, mais peu détaillée

En marge de la signature de plusieurs accords bilatéraux (diplomatie, sécurité, culture, sport), cette visite est surtout la première que le président Oligui effectue à Malabo depuis son arrivée au pouvoir. Elle s’inscrit donc dans une stratégie de redéploiement diplomatique du Gabon, soucieux de restaurer son image sur la scène régionale. Toutefois, aucune précision n’a été donnée sur les délais, le financement ou la composition effective de ce comité.

Le président gabonais participera par ailleurs, le 7 juin, à la 26e session ordinaire de la CEEAC, dont le thème « Consolider les acquis de la réforme de la CEEAC » résonne avec les ambitions d’intégration régionale souvent affichées… mais rarement concrétisées.

Vers une diplomatie de résultats ?

Si l’initiative actuelle marque une volonté politique de rompre avec l’immobilisme, elle devra être suivie de gestes forts et d’un engagement ferme des deux parties. Car dans ce type de conflit latent, la paix n’est pas une simple déclaration d’intention, mais un processus exigeant qui ne tolère ni improvisation ni procrastination.

le comité conjoint d’experts pourrait représenter une avancée historique… ou une occasion manquée de plus, si la volonté politique ne s’accompagne pas d’une rigueur méthodologique, d’une feuille de route transparente et d’un engagement réel à clore ce dossier. Les peuples gabonais et équato-guinéens, eux, attendent des actes pas des promesses.

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