CNEAPCE : Une réforme électorale sous pression, quinze jours pour tout refonder
Annoncée le 7 décembre dernier à Paris, la mise en place de la Commission nationale pour l’élaboration de l’avant-projet du Code électoral (CNEAPCE) marque une nouvelle étape dans le processus de transition engagé au Gabon. Mais ce qui attire l’attention, au-delà de l’objectif ambitieux de refondre le système électoral, c’est le délai extrêmement court imposé aux 27 membres de cette commission : seulement quinze jours pour mener à bien leur mission.
Un délai contraignant pour une tâche titanesque
Quinze jours. Ce délai, aussi restreint qu’inédit, soulève de nombreuses interrogations. Comment, dans un laps de temps si court, produire un texte électoral à la fois exhaustif, consensuel et dépouillé des nombreux biais qui ont discrédité les élections gabonaises par le passé ? Cette temporalité compressée ne risque-t-elle pas de compromettre la qualité et la pertinence des réformes nécessaires ?
Le processus électoral gabonais a accumulé, au fil des années, des scories profondes, allant des lois électorales ambiguës à une organisation administrative contestée. Pour les observateurs, un délai d’au moins un mois aurait été plus réaliste pour permettre un travail méthodique, impliquant des consultations approfondies des acteurs politiques et des organisations de la société civile.
Un travail d’urgence dans un contexte sensible
Ce délai serré peut s’expliquer par l’urgence politique et institutionnelle dans laquelle se trouve le pays. Avec des élections prévues dès 2025, les autorités de transition souhaitent avancer rapidement pour respecter le chronogramme de retour à l’ordre constitutionnel. Cette précipitation est également dictée par la volonté d’éviter l’enlisement dans des débats interminables, qui pourraient retarder la transition et fragiliser la confiance des citoyens.
Cependant, la précipitation comporte des risques évidents. Une réforme bâclée pourrait aboutir à des textes électoraux imprécis ou incomplets, perpétuant ainsi les dysfonctionnements passés. Le colonel Ulrich Manfoumbi Manfoumbi, porte-parole du CTRI, a certes assuré que les recommandations du Dialogue national inclusif seront intégrées, mais ces dernières nécessitent un travail de réflexion et d’adaptation qui semble incompatible avec un calendrier aussi court.
Un pari risqué, mais stratégique
Le délai de quinze jours illustre la pression à laquelle sont soumises les autorités de transition pour respecter leur calendrier. Mais il met également en lumière une gestion du temps qui, selon certains analystes, pourrait compromettre l’objectif de produire des textes réellement transformateurs.
La CNEAPCE devra donc redoubler d’efforts pour concilier rapidité et qualité.En tout état de cause, ce choix stratégique reflète une volonté de montrer des résultats rapides et tangibles à la communauté nationale et internationale. Mais la question demeure : peut-on espérer une réforme électorale exhaustive et consensuelle en si peu de temps ? Si le pari échoue, les élections à venir risquent d’être une fois de plus entachées par des critiques sur la crédibilité du processus.
Pour l’heure, les Gabonais suivent avec attention cette étape cruciale, dans l’espoir que cette réforme, malgré la contrainte des délais, parvienne à jeter les bases d’une démocratie renouvelée. Le succès ou l’échec de cette mission sera décisif pour l’avenir politique du pays.