SOCIETE

Adrien Nguema Mba face aux jeunes diplômés en anthropologie : une déclaration controversée qui soulève des interrogations

Libreville, Gabon – Les propos tenus récemment par le Ministre du Travail et de la Lutte contre le Chômage, Adrien Nguema Mba, à propos des jeunes diplômés en anthropologie, continuent de susciter une vive polémique. Lors d’un reportage diffusé sur un média local, devenu rapidement viral sur la toile, le ministre a affirmé détenir 1 200 dossiers de jeunes diplômés en anthropologie, tout en s’interrogeant sur leur avenir professionnel dans un Gabon en pleine « période de transition ».

Sa remarque, « Qu’est-ce que vous voulez qu’on fasse avec les diplômés d’anthropologie au Gabon en temps de transition ? », a été perçue par beaucoup comme un aveu d’échec de la part des autorités concernant l’insertion professionnelle des jeunes dans des filières perçues comme “non productives”. Implicitement, le ministre a semblé suggérer que l’anthropologie n’a pas de place dans le marché de l’emploi gabonais actuel, un constat qui a choqué de nombreux diplômés et spécialistes du secteur universitaire.

Une déclaration mal accueillie : déni ou réalité ?

Pour une grande partie de la jeunesse diplômée, les propos du ministre révèlent non seulement un manque de considération pour les disciplines académiques telles que l’anthropologie, mais aussi une absence de vision à long terme en matière de politique de l’emploi. En suggérant que ces diplômés ne trouvent pas leur place dans l’économie gabonaise, le ministre renforce l’idée que certaines filières universitaires, malgré des années de formation, n’offrent pas d’issues viables.

Cependant, de nombreux experts soulignent que l’anthropologie, discipline qui étudie les sociétés humaines, leurs cultures et leurs dynamiques sociales, pourrait jouer un rôle clé dans des secteurs tels que la gestion des populations, le développement communautaire, ou encore la compréhension des crises sociales et politiques, particulièrement dans un pays en transition comme le Gabon. Plutôt que de remettre en cause l’utilité de la discipline, la question devrait porter sur l’adaptation des politiques publiques pour valoriser ces compétences spécifiques.

L’entrepreneuriat comme seule alternative : une fuite en avant ?

Lors de son intervention, Adrien Nguema Mba a également laissé entendre que l’entrepreneuriat pourrait être une voie à envisager pour ces jeunes diplômés. Toutefois, cette réponse a été largement critiquée. “Proposer l’entrepreneuriat à tout va, c’est une manière d’éviter de traiter le véritable problème“, déclare un économiste gabonais. “Ces jeunes ont été formés pour servir leur pays, pour apporter une plus-value intellectuelle et culturelle, et l’État ne peut pas les abandonner à eux-mêmes.”

Si l’entrepreneuriat est effectivement une option intéressante pour certains, il ne peut être vu comme une solution universelle, surtout dans un contexte où les opportunités économiques sont limitées et où les soutiens structurels pour les jeunes entrepreneurs restent fragiles. En proposant l’entrepreneuriat comme solution à la place d’une véritable politique d’intégration professionnelle, le gouvernement semble ignorer les défis réels auxquels font face ces jeunes diplômés.

Une remise en question du système d’orientation universitaire

Au-delà de la polémique, les propos du ministre soulèvent une question plus profonde sur l’orientation universitaire au Gabon. Chaque année, des milliers de jeunes s’engagent dans des cursus universitaires sans véritable garantie d’insertion professionnelle à la fin de leurs études. Ce dysfonctionnement, couplé à l’absence d’une stratégie claire pour intégrer des disciplines comme l’anthropologie dans les politiques publiques, contribue à renforcer la fracture entre l’université et le marché de l’emploi.

Pour de nombreux observateurs, il est urgent que le gouvernement revoie ses priorités en matière d’éducation et d’emploi, en adaptant l’offre de formation aux besoins réels du pays, tout en assurant une meilleure intégration des diplômés dans tous les secteurs de l’économie, y compris ceux traditionnellement sous-estimés comme les sciences humaines.

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