Bilie-By-Nze réclame une Commission vérité-réconciliation pour faire la lumière sur les morts de 2016
Libreville, 6 octobre 2024 – L’ancien Premier ministre Alain-Claude Bilie-By-Nze a relancé un débat sensible au Gabon en appelant à la création d’une Commission vérité-réconciliation pour enquêter sur les événements post-électoraux de 2016. Dans une interview récemment diffusée sur les réseaux sociaux, il a insisté sur la nécessité de clarifier les responsabilités et d’établir la vérité sur le nombre de morts et les supposés charniers liés à la crise. Ces déclarations surviennent alors que le Gabon est en pleine transition politique après la chute du régime d’Ali Bongo en août 2023.
“Je refuse de porter le chapeau”
Bilie-By-Nze, qui a longtemps été un pilier du régime Bongo, se retrouve aujourd’hui à défendre son rôle dans la gestion de la crise post-électorale de 2016, un épisode tragique qui a marqué la conscience collective gabonaise. Critiqué par ses détracteurs pour sa communication à l’époque, il avait été l’un des visages du gouvernement durant cette période troublée. Accusé d’avoir minimisé le nombre de morts, il a déclaré lors de cette récente interview : “Je refuse de porter le chapeau”. Il a expliqué que les chiffres qu’il avait annoncés, un mort puis huit morts, lui avaient été transmis par les services officiels de l’État, et ne reflétaient pas sa propre évaluation des faits.
“Ce ne sont pas les chiffres de Bilie-By-Nze, ce sont les chiffres du gouvernement”, a-t-il souligné, rejetant ainsi toute responsabilité personnelle. Il a ajouté que son rôle à cette époque était celui d’un porte-parole, sans lien direct avec la chaîne de commandement militaire, insistant sur le fait qu’il n’a jamais donné d’instructions en lien avec la gestion des violences.
Une demande pressante de vérité
Dans ses déclarations, l’ancien Premier ministre a insisté sur la nécessité d’une Commission vérité-réconciliation pour permettre aux Gabonais de comprendre ce qui s’est réellement passé en 2016. “Il y a eu beaucoup de mensonges et de désinformation“, a-t-il déclaré.
“Nous devons savoir combien de personnes ont réellement perdu la vie, s’il y a eu des charniers, et qui étaient les donneurs d’ordres.”Il a rappelé que Paulette Missambo, actuelle présidente du Sénat, avait elle-même plaidé en faveur d’une telle Commission au début de l’année 2024, avant que cette idée ne semble disparaître de l’agenda politique du gouvernement de transition. “Pourquoi ne veut-on pas que les Gabonais sachent ce qui s’est passé ?”, s‘est-il interrogé.
Pour Bilie-By-Nze, la mise en place de cette Commission est essentielle pour non seulement établir la vérité sur les événements de 2016, mais aussi aborder les autres enjeux critiques du régime Bongo, notamment les allégations de corruption.
Le projet de réhabilitation économique et les critiques envers le CTRI
Bilie-By-Nze n’a pas seulement axé ses critiques sur les événements de 2016. Il a également dénoncé ce qu’il considère comme une récupération politique des projets économiques initiés sous le régime Bongo par le Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI). Il a notamment critiqué l’attribution des succès de la réhabilitation de la Transgabonaise et de la construction des châteaux d’eau au CTRI, affirmant que ces projets avaient été lancés bien avant la transition actuelle.
“On ment aux Gabonais“, a-t-il affirmé, dénonçant la présentation de ces infrastructures comme de nouvelles réalisations. “Ces projets étaient en cours bien avant la transition. Je sais comment ils ont été conçus, c’est moi qui les ai lancés.”
Alors que le Gabon se trouve à un tournant historique, avec un régime de transition qui promet réformes et justice, l’appel d’Alain-Claude Bilie-By-Nze à une Commission vérité-réconciliation soulève des questions cruciales sur la gestion des crises passées et l’avenir politique du pays.
Si cette demande peut sembler légitime pour tourner la page des événements de 2016, elle survient à un moment où l’ancien Premier ministre semble vouloir réhabiliter son image et marquer son retour sur la scène politique. Les Gabonais, quant à eux, restent divisés : faut-il voir en Bilie-By-Nze un leader cherchant à éclairer la vérité ou un politicien habile tentant de sauver sa carrière ? Seul l’avenir nous dira si son appel résonnera dans les sphères du pouvoir, ou s’il s’éteindra