Gabon : La montée inquiétante des prêts informels à taux d’intérêt élevé

Face aux difficultés économiques et au coût de la vie qui ne cesse d’augmenter, de nombreux Gabonais se tournent vers une solution alternative mais risquée : les prêts d’argent à taux d’intérêt élevé, aussi appelés « bons par intérêt ». Ce phénomène, autrefois marginal, est devenu une pratique courante, notamment dans les grandes villes comme Libreville, Port-Gentil ou Franceville.
Avec des fins de mois de plus en plus difficiles à boucler, les ménages, les petits entrepreneurs et même certains fonctionnaires contractent ces prêts auprès de prêteurs informels qui imposent des taux d’intérêt exorbitants.
Un système parallèle qui prospère dans la précarité
Les bons par intérêt fonctionnent sur un principe simple : un prêteur fournit une somme d’argent avec un taux d’intérêt fixe, généralement compris entre 20 % et 50 % du montant emprunté. Le remboursement se fait sur une période déterminée, souvent en quelques semaines ou quelques mois, sous peine de voir la dette exploser.
« Il m’a fallu emprunter 200 000 FCFA pour payer des frais médicaux. En un mois, je devais rembourser 300 000 FCFA. C’était ça ou ne pas me soigner », témoigne Patrick N., un habitant de Libreville.
Ce marché parallèle est alimenté par l’incapacité des banques et institutions financières traditionnelles à proposer des crédits accessibles à tous. Les conditions strictes d’octroi de prêts bancaires (garanties, revenus stables, historique de crédit) excluent une grande partie de la population, poussant ainsi les Gabonais à se tourner vers ces solutions alternatives.
Des risques majeurs pour les emprunteurs
Si ces prêts peuvent offrir une solution rapide à un problème financier urgent, ils plongent de nombreux emprunteurs dans un cycle infernal de dettes. Plusieurs dangers sont à souligner :
- Taux d’intérêt prohibitifs, rendant le remboursement quasi impossible pour les plus fragiles.
- Pressions et menaces en cas de non-remboursement, allant parfois jusqu’à des saisies illégales ou des violences physiques.
- Absence de régulation, laissant place à des pratiques abusives et à un marché informel difficilement contrôlable.
Les autorités gabonaises restent impuissantes face à ce phénomène qui prend de l’ampleur. L’absence de cadre juridique spécifique sur ces prêts informels rend la régulation difficile, bien que certaines associations de consommateurs appellent à des réformes urgentes pour protéger les emprunteurs.
Un symptôme de la crise économique et sociale
L’essor des bons par intérêt révèle une crise plus profonde : la difficulté pour de nombreux Gabonais d’avoir un accès stable aux ressources financières.
Avec l’augmentation du coût de la vie, la baisse du pouvoir d’achat et la précarité de l’emploi, ces prêts deviennent un moyen de survie pour une partie croissante de la population.
« Aujourd’hui, il est plus facile d’emprunter à un particulier qu’à une banque. Mais à quel prix ? » s’interroge Mireille O., commerçante à Port-Gentil.
Quelle alternative face à cette spirale d’endettement ?
Face à cette situation préoccupante, des solutions doivent être envisagées :
- Un meilleur accès aux microcrédits, avec des taux d’intérêt plus raisonnables.
- Un encadrement juridique strict des prêts informels pour limiter les abus.
- Une sensibilisation des populations aux dangers de ces emprunts et aux solutions alternatives.
Le gouvernement pourra-t-il réguler ces pratiques avant qu’elles ne deviennent incontrôlables ? En attendant, des milliers de Gabonais continuent de s’endetter dans l’ombre, risquant chaque jour de tomber dans un piège financier dont il est difficile de sortir.